Photo : © Habitant(s) © Nicolas Joubard - 2014
Les Tombées… presque déconfinées
Quand le déconfinement nous évoque des aventures passées.

Une sélection de photos déconfinées


C’était les Tombées confinées

Une sélection de photos confinées


Les Veilleurs de Rennes – Joanne Leighton (BE / AU) – 2012 > 2013

“Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages mais à avoir de nouveaux yeux.”

Marcel Proust

Du 30 septembre 2012 au 29 septembre 2013, Joanne Leighton et Les Tombées de la Nuit proposaient la performance Les Veilleurs de Rennes, pour 729 participants.

365 jours durant, chaque matin et chaque soir, au lever et au coucher du soleil et depuis le toit-terrasse du bâtiment situé à l’angle du cours des Alliés et de la rue de l’Alma, une personne veillait Rennes et sa région, pendant une heure. 

Une folle aventure, intime et partagée.

Extrait du hors-série Les Rennais

VINCENT, MÉDECIN, VEILLE SUR LES PRÉCAIRES 

Depuis plusieurs années, Vincent, médecin généraliste dans le Morbihan, donne de son temps et de son expérience pour prévenir et soigner les maux des personnes précaires. 

Médecin généraliste proche de la retraite, Vincent aurait pu continuer à exercer son métier dans la sécurité de son cabinet. Mais l’homme en a décidé autrement. 

Depuis quelques années maintenant, il se rend deux demi-journées par semaine dans un centre d’examens de santé qui reçoit des personnes précaires – bénéficiaires des minima sociaux, du RSA, de la CMU, jeunes en insertion, demandeurs d’emploi,… – afin d’effectuer avec elles un bilan de santé complet et gratuit. « Celui qui est habituellement suivi par un médecin n’en a pas vraiment besoin, affirme Vincent. Pour les personnes précaires, c’est loin d’être un luxe. » 

Pendant près de quatre heures, les patients passent plusieurs tests. Prises de sang, examens du souffle, de la vue, de l’audition, électroencéphalogramme… « Diabète, arthrite, maladies liées à des problèmes d’hygiène… sont autant de maladies que nous détectons. Sans compter les urgences à traiter. Car certains viennent ici très mal en point et nous nous devons de les envoyer directement à l’hôpital. » 

Pour Vincent, l’intérêt de ces bilans n’est plus à démontrer. Le médecin est ravi aussi du temps accordé. « Une chose essentielle de ces rendez-vous est le temps dont nous jouissons. L’entretien peut durer une demi-heure, voire plus. Un moment d’échange important pour ces personnes que la vie n’épargne pas. Surtout que comme nous ne nous connaissons pas, ou très peu, entre médecin et patient, nous nous sentons libres de parler, de dire les choses telles que nous les percevons. Par ailleurs, s’ils le souhaitent, une infirmière psychologue est également présente au centre pour parler avec eux. » 

Vincent s’avoue heureux d’avoir saisi cette opportunité. « Ce travail auprès des personnes précaires, cette veille permanente sur leur santé me procure le sentiment de servir de nouveau à quelque chose. Cela redonne du sens à ma vocation. » 

Anne-Laure Grosmolard 

Les Veilleurs de Rennes par KuB

Les Rennais – hors-série > 365 jours de veille


Trois semaines de confinement assurées : il est encore temps de vous faire couper les cheveux par vos enfants !

Haircuts by Children – Mammalian Diving Reflex / Darren O’Donnell (CA) – Juillet 2019

La performance Haircuts by children regroupait trente élèves de sixième du collège Échange, prenant entièrement en charge le fonctionnement d’un salon de coiffure, de la prise de rendez-vous jusqu’à la coupe. Une première en France pour cette aventure artistique collective, sociale et très politique, fomentée par les canadiens du Mammalian Diving Reflex.

Quand on parle de droits des enfants et de collaboration artistique, Darren O’Donnell, le directeur de l’atelier de recherche du Mammalian Diving Reflex, ne plaisante pas. Le long protocole reçu en amont aux Tombées de la Nuit encadre très clairement les droits, devoirs et méthodologie spécifiques des relations entre adultes et enfants. Car, derrière cette performance artistique où vous « confiez votre tête à des enfants coiffeurs », c’est bien l’élaboration d’un nouveau contrat social, basé sur la confiance, l’égalité, le courage, l’intimité, et la reconnaissance totale des droits des enfants, qui est en jeu. « Dans cette forme d’art hybride basée sur l’interaction, l’adulte s’abandonne complètement à la vision de l’enfant » résume Hazel Venzon du Mammalian Diving Reflex. Avec Ryan Lewis, elle a fait le voyage depuis Toronto pour cette première création en France de Haircuts by Children.

Une centaine d’élèves volontaires des classes de sixième du collège Échange de Rennes se sont inscrits pour participer au projet. Trente ont été tirés au sort, garçons et filles. « Ce n’est pas tous les jours que des enfants ont le droit de couper les cheveux des adultes, affirme Yael pour expliquer sa motivation. Et en plus, c’est une première dans le pays ! ». Le projet débute dés le lundi par une  rencontre avec Ryan et Hazel. Le cadre est encore un peu formel dans les murs du collège. Mais un vent d’inédit et d’inhabituel flotte déjà. « On y a parlé, en toute liberté et sous forme de débat, d’art social et de droit de l’enfant » résume Alice Butet, en charge du projet pour le festival. Le lendemain matin commencent les quatre demi-journées de formation à l’école de coiffure L’Academy, boulevard Solferino, sous l’œil aguerri de Marion et Corinne. Professeurs et surveillants gèrent les transports depuis le collège. Sur place, technique et créativité se mêlent : maniement des ciseaux, consignes de sécurité, gestion des longueurs, des couleurs… Ludovic André, le directeur du salon de coiffure Urban Expression qui va accueillir le projet, est déjà là, au plus près des élèves artistes. « Quand Claude Guinard m’a parlé du projet, j’ai dit banco tout de suite, explique-t-il. Nous faisons déjà des vernissages au salon, plein de choses périphériques, et j’ai trouvé cette idée géniale. Sans doute parce que j’ai pris des voies un peu originales dans l’apprentissage de mon métier. Mais l’énergie, l’application et la concentration des enfants pendant toute cette semaine ont été vraiment impressionnantes ».

Samedi, c’est le grand jour. Les artistes coiffeurs sont à pied d’œuvre dès 11h pour préparer le salon, prendre les appels et gérer le carnet de rendez-vous. Un stand de vente de limonade est installé sur le trottoir. Ils tractent déjà dans la rue Saint-Melaine pour proposer une « coupe gratuite » et expliquer le projet. Le tout en complète autonomie. « Même si nous avons été un peu formés, on a surtout le droit de rater » se rassure Gabin alors qu’une trentaine de coupes sont déjà calées pour la journée. Certaines se feront à la demande des clients. Mais beaucoup d’entre eux les laisseront libres de faire ce qu’ils veulent. Le résultat est souvent surprenant. On croisera donc tout le week-end dans Rennes des coupes très colorées, arborées fièrement par les participants de Haircuts. « C’était dur d’apprendre en quatre jours à couper des cheveux, explique Arthus. Mais les adultes nous ont vraiment fait confiance et ils étaient tous contents en sortant du salon ».

Dimanche, la fatigue se fait ressentir en fin de journée. Mais joie et fierté se lisent sur tous les visages. Dans cet espace social sécurisé, enfants et adultes se sont donc rencontrés en confiance et en liberté pour partager cette expérience unique, intime et totalement inhabituelle. « Nous avons vécu de véritables moments de grâce avec ces enfants, en osant le laisser-faire, la confiance, explique Guillaume, traducteur et assistant projet pour Les Tombées de la Nuit. En nous débarrassant, en tant qu’adultes, d’une certaine vision et de certaines habitudes pour laisser s’exprimer leur énergie, leur capacité d’organisation et de création ». Une constante du travail de Darren O’Donnell et de son Mammalian Diving Reflex.

Haircuts reprendra donc sa route à travers le monde après cette semaine à Rennes qui a semblé faire date. « Bénéficier ainsi de toute l’infrastructure d’un festival, d’une académie de coiffure, d’un collège motivé et d’un salon partenaire a pu créer cette semaine vraiment exceptionnelle pour nous… et les enfants ! » résume Ryan Lewis. Près de soixante-dix personnes seront ainsi passées sur les fauteuils du salon Urban Expression pendant le week-end. Une nouvelle preuve des possibles de l’enthousiasme, de la curiosité et de la confiance.

Goulven Hamel

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