Maryline Honoré a participé, comme habitante-complice, à Adagio per un Nuovo Millennio, présenté le 4 février à la salle de la Cité. Un spectacle d’attention à l’autre et de liens, à l’image de sa carrière aux Tombées de la Nuit.
« Laissez cette valse être plus lumineuse. Oui… Faites-vous plaisir ! » : lors d’une dernière répétition avant les représentations, les trois artistes de la compagnie Wooshing Machine guident les mouvements lents d’une vingtaine d’habitantes et habitants complices. Pour Adagio per un Nuovo Millennio, la compagnie a imaginé une chorégraphie en miroir, pour se reconnecter les uns aux autres. Les voir accorder leurs gestes ensemble est émouvant.
L’esquisse d’un sourire
Parmi les habitants-complices, Maryline Honoré se déplace pianissimo, concentrée. Attentive aux autres et à son corps. « Dans ce projet, j’ai beaucoup aimé la cohésion de groupe, la beauté des gestes et la mise en musique », décrit celle que ravissent des notes chaleureuses de soul ou de flamenco. « Et puis j’étais sereine, car toute la partie administrative et contractuelle du projet était déjà bouclée ». Maryline Honoré n’est pas une habitante-complice comme les autres. Ce n’est que la deuxième fois qu’elle participe à un projet des Tombées de la Nuit. Pourtant, elle les connait tous par cœur.
Assistante de direction et chargée de production aux Tombées de la Nuit, Maryline est, notamment, un point de repère pour toutes les compagnies qu’accueille la structure : « Je m’occupe du suivi des budgets et des plannings, des devis, des feuilles de route, des hébergements et de l’accueil des équipes artistiques ». Rationnelle, elle aime la logistique, l’organisation méticuleuse. « C’est mon côté psychorigide », glisse-t-elle avec un sourire en coin. Pour mieux gérer les imprévus… Comme cet hôtelier qui a oublié six réservations. Ou ce coup de fil de 3h du mat’, des musiciens qui ont perdu les clés de leur chambre.
Un pas de côté
Dans Adagio comme dans beaucoup d’autres propositions des Tombées de la Nuit, Maryline aime le décalage, « le pas de côté, comme on dit dans le milieu », gentiment moqueuse. À l’origine, le spectacle vivant n’est pas son milieu. Quand l’adjoint à la culture Martial Gabillard crée Les Tombées de la Nuit au début des années 1980, Maryline travaille à l’office de tourisme, à l’accueil des congressistes. Peu à peu, elle s’occupe de compagnies sur le festival. « C’était l’émergence de l’art de rue, les débuts du festival d’Aurillac et de la troupe Royal de Luxe. »
En 2003, Maryline saute à pieds joints dans l’aventure des Tombées de la Nuit emmenée désormais par Claude Guinard. « J’ai quitté l’office de tourisme pour intégrer une nouvelle équipe, en route pour une nouvelle aventure. »
Un doigt sur des touches
Dans quelques semaines, Maryline part à la retraite. De ses années fidèle au poste, elle retient le plaisir du contact et du lien avec les compagnies. Digérant mal les avalanches de mails, Maryline est de l’école qui décroche son téléphone : « Je parle, je tutoie, je mets à l’aise. C’est fou le temps qu’on gagne avec le contact direct ! » Il se place là aussi, dans ce lien humain, le fameux compagnonnage des Tombées de la Nuit avec les compagnies.
Dans ces discussions, elle a aussi mesuré que la vie d’artiste n’était pas si simple : « Cela demande de l’opiniâtreté, de croire à son projet, d’être tout le temps sur la route. Et en même temps de se remettre en cause en permanence, surtout depuis le Covid. »
Le cœur en mouvement
Aux Tombées, Maryline se sent chanceuse d’avoir bénéficié de ce « mouvement constant » : « des nouvelles formes artistiques, dans des lieux insolites, pas de pré carré, pas de sclérose », décrit celle qui dit pourtant s’ennuyer vite. Elle souhaite à l’équipe de continuer « à interpeller, à questionner, à impliquer, à toucher ». Elle aura enfin le temps de reprendre un abonnement au théâtre et au cinéma, de voyager, « et de rejoindre le groupe des habitants-complices ». Pour continuer la danse.
Audrey Guiller.